Article et photos Alain Hénaff
Les 21 et 22 novembre 2009, dans le cadre de ses commémorations quinquennales et 65 ans après, le RICM, une fois de plus, reprenait le chemin de l'Est, région de France imprégnée du sang de ses marsouins.
Nombreux sont les Anciens qui avaient effectué le déplacement pour retrouver leurs camarades de la 6e section, du groupe "Tito et du GEP.
Rarement égalé ailleurs, l'accueil des autorités locales et des populations fut à la hauteur de leur attachement à des valeurs affichées avec conviction et fierté. Qu'ils en soient ici tous chaleureusement et sincèrement remerciés, à commencer par les premiers d'entre eux : messieurs les maires Francis Demuth et Christian Hirsch.
Le monument se voit de loin; à flanc de coteau sur un contre-fort du massif du Lomont; dans cette prairie, « à l'orée du bois où [...] avaient vécu pendant plusieurs mois » les résistants du groupe Tito.
Sous le pâle soleil de novembre, rassemblés autour de ce monument, quelques-uns de ces maquisards de la première heure... le temps inexorablement a fait son oeuvre et les rangs se sont éclaircis ! Mais une fois de plus, ils sont venus, comme tous les ans... pour se souvenir de leur chef Henri Bourlier dit Tito et de leur jeunesse aux lendemains incertains.
Bien évidemment, cette année il y a davantage de monde. Autour d'eux, près d'eux, les Anciens du RICM, de la 9e DIC ou de la 1ère DB qui combattaient en se dirigeant vers le Rhin; ceux de l'Indo et de l'Algérie qui menèrent d'autres combats tout aussi glorieux et honorables; et puis d'autres encore, plus jeunes... heureux et fiers de rencontrer d'authentiques patriotes, héros locaux parfois méconnus.
Une vingtaine de drapeaux représente les associations patriotiques de cette région du Doubs où l'opiniâtreté de l'ennemi commença à provoquer des sillons sanglants dans les rangs de nos troupes à l'offensive.
Le général Jean-Gabriel Collignon, président national de l'ANA RICM, s'avance vers le monument accompagné de Jacques Bourquin, président de l'Amicale Tito et l'un des dix premiers membres du maquis, et de Pierre Maineult, ancien de ce maquis.
Le temps d'une photo-souvenir avec les Coqs du capitaine Sébastien Botheron et du peloton de jeunes engagés de l'adjudant David Miclo et il faut déjà reprendre la route pour la commémoration suivante.
Quelques minutes suffisent pour rejoindre la stèle où l'on commémorera la mémoire de l'équipage du char Astucieux détruit par l'ennemi dans la soirée du 11 septembre 1944.
Ce jour-là, au cours de sa progression sur cette petite route qui mène à Villars-sous-Écot, le 3e peloton du 1er escadron (cne de La Séglière) perdait trois de ses hommes : Alphonse Decemont (chef de char), Francis Cavallero (pilote) et Jean Satge (pilote mitrailleur). Seul le tireur, Jean Sicre, échappait de peu à la mort.
Le dispositif se met en place malgré l'étroitesse de l'emplacement. Sans qu'il soit besoin de la présence d'un quelconque service d'ordre, la route est coupée mais ici pas de nervosité de la part d'automobilistes impatients. On sait de quoi il s'agit !
L'un des adjoints au maire de la commune lit une brève communication puis dépose une gerbe au pied de la stèle. Le général Collignon et Jean Giroud, président de la 6e Section de l'ANA, font de même. Recueillement là encore, en imaginant ces jeunes français disparaissant dans la fournaise de leur char en flammes alors qu'ils participaient avec abnégation et enthousiasme à la libération de leur pays.
En cette fin d'après-midi, l'ensemble des participants se déplacent maintenant vers Villars-sous-Ecot, petite bourgade coincée au creux d'une longue vallée qui, en son temps, fut fatale à nos marsouins.
C'est en effet en ces lieux que le 11 septembre 1944, un peloton du 2e escadron (cne Couturier) était pratiquement anéanti... Il s'agissait du 3e peloton commandé par le sous-lieutenant Frédéric Gourio, tué au combat avec onze de ses hommes alors que l'ennemi capturait par ailleurs tous ceux qui, pour beaucoup blessés, n'avaient pu sortir indemne de ce piège infernal.
Cette cérémonie du souvenir leur est dédiée, ainsi qu'aux vingt-deux habitants du village, hommes de tous âges, fusillés à titre de représailles le jour même.
Cérémonie intimiste s'il en est, en ce frais début de nuit automnale. Sur cette minuscule place de la mairie, où véritablement au coude à coude s'unissent autorités, Anciens, délégations, drapeaux, troupe sous les armes et population, se concrétise et transparaît le sentiment d'appartenir à une communauté soudée par des liens indéfectibles. Après la brève allocution du général Collignon, il n'est que d'écouter le discours du maire, monsieur Christian Hirsch, pour comprendre ce que patriotisme veut dire aux yeux de nos concitoyens des marches de l'Est. Pour comprendre également l'accueil réservé aux survivants de cette campagne de libération mais aussi à leurs dignes héritiers : nos jeunes marsouins d'aujourd'hui.
A la suite de cette cérémonie émouvante et authentique, une petite délégation se rend au carré des fusillés pour un dépôt de gerbe et quelques instants de recueillement.
Après tous ces souvenirs inévitablement douloureux voire tragiques pour beaucoup, arrive le temps de la décontraction et des échanges informels.
Pour cette soirée de confraternisation, les Anciens du RICM et le détachement de Poitiers sont les invités de Villars-sous-Écot. Après le traditionnel pot de l'amitié et le brassage réalisé pour chaque table, l'ambiance devient rapidement chaleureuse et le partage entre générations s'opère de la manière la plus naturelle, les plus jeunes se montrant attentifs et curieux aux récits de leurs Anciens.
Il est déjà très tard lorsque, pour la dernière fois de la journée, le général Collignon prend la parole pour remercier avec force nos hôtes du moment, soulignant la qualité de l'accueil et le haut esprit patriotique qui anime les habitants de cette région et tout particulièrement ceux de Villars-sous-Écot. A son tour, monsieur le Maire, rappelle, entre autre, l'attachement de son village à ceux qui vinrent le libérer 65 ans plus tôt, au péril de leurs vies.
C'est le 4e escadron du capitaine Pol qui a livré les combats
pour la libération de Seppois-le-Bas le 19 novembre 1944.
Sous ses ordres également, le 5e peloton porté commandé
par le sous-lieutenant Henri Bourlier dit Tito.
65 ans plus tard, sur les lieux mêmes de ces combats, un
représentant de chaque peloton est là pour témoigner :
P1/Yvon Champême - P2/Louis Soccoja - P3/Jo Muracciole -
P5/GEP Daniel Cusenier.
Et toujours bon pied, bon oeil !
Aujourd'hui la bourgade célèbre le 65e anniversaire de sa libération par le RICM. Le bleu-blanc-rouge agrémente les façades pastelles des maisons et, en ce début de matinée, les mouvements sont nombreux en direction de la place principale située en contrebas de l'église et du monument aux Morts.
La mobilisation est générale : élus, associations patriotiques, corps constitués, enfants des écoles... Pendant près d'une heure et demie, et en différents lieux, ils accompagneront, avec ferveur et attention, les Anciens et les marsouins du RICM au cours des étapes successives de la commémoration.
C'est tout d'abord dans une église comble que se retrouvent tous ceux qui, par la prière, souhaitent s'associer à cette journée si particulière, notamment pour les habitants les plus âgés de la commune.
Le début de la cérémonie militaire s'effectue ensuite sous un ciel menaçant d'où s'échappent quelques gouttes de pluie.
Le chef de corps du RICM, le colonel François Labuze et le drapeau sont bien évidemment présents ainsi que six anciens chefs de corps : les généraux Jacques Leroy (1978-80), Jean-Gabriel Collignon (1980-82), Patrice Sartre (1992-94), Dominique Artur (2000-02), Éric Bonnemaison (2002-04) et le colonel Gérard Lagane (1982-84).
Après les honneurs à l'emblème le plus décoré des Armées, Monsieur Francis Demuth, le maire de Seppois-le-Bas, accompagné de deux présidents d'anciens combattants de la région, dépose une gerbe au monument aux Morts.
Fanfare du 8e Régiment de Hussards en tête, le cortège se forme alors pour rejoindre les trois sites successifs sur lesquels tous se souviendront et se recueilleront. Pour les deux premiers monuments (Char "Assas" et Groupement Mobile d'Alsace/31e BCP), le cérémonial sera simple avec dépôt de gerbes, sonnerie aux morts et minute de silence.
Le 19 novembre 1944, trois marsouins du RICM furent tués lors
de la libération de Seppois-le-Bas. Deux étaient membres de
l'équipage du char Assas : le caporal-chef Julien Puly et le
soldat Charles Riche. Le troisième était le soldat Edgar Tuetey,
du 5e peloton porté Tito.
A la sortie de Seppois-le-Bas, en direction de Delle, se situe le monument du RICM. Malgré l'étroitesse du lieu, chacun trouve rapidement sa place et la cérémonie peut commencer par l'allumage symbolique d'une flamme avec les Anciens du 4e escadron qui participèrent à la libération du village.
Faisant suite à une allocution de Jean Giroud, président de la 6e Section, monsieur le maire, Francis Demuth, prend à son tour la parole pour rappeler à tous ce que fut cette occupation ennemie accompagnée d'une tentative de germanisation de l'Alsace. Il évoque également les enrôlés de force dans l'armée allemande et les 40.000 morts en des combats qui n'étaient pas les leurs. Il souligne enfin combien était attendue l'arrivée des libérateurs, le bonheur qu'elle provoqua et insiste sur l'inaltérable reconnaissance de la population pour le RICM et ses combattants. Beaucoup d'émotion et de convictions aussi dans ses paroles.
Après le discours du général Collignon, plusieurs gerbes sont déposées par différentes autorités accompagnées par des enfants des écoles qui chantent ensuite la Marseillaise reprise par toute l'assistance.
En cette journée solennelle et chargée d'histoire, il reste encore un moment d'émotion et de fierté à partager. Ancien du 2e escadron et des combats de la Libération (cne Couturier), cité à l'ordre de la division, notre camarade Pierre Martinez est décoré de la Médaille Militaire par le colonel Labuze (cf page Tableau d'honneur).
Avec le retour vers le centre-ville dans les mêmes dispositions s'achève cette matinée du souvenir. Les honneurs au drapeau sont rendus une dernière fois par le 3e escadron du capitaine Botheron.
La journée est cependant loin d'être terminée. A l'invitation de la commune de Seppois-le-Bas, tous les participants se retrouvent, pour le verre de l'amitié, dans la salle des fêtes de Seppois-le Haut, prêtée pour l'occasion. Ce regroupement informel permettra au général Collignon de remettre, au nom de la FNAOM, la médaille du Mérite Colonial à trois personnalités de Seppois-le-Bas fortement impliquées dans leurs relations avec le RICM :
Vers 13:30, autorités, Anciens du RICM et anciens combattants locaux rejoignent le village de Largitzen pour un long et convivial repas. Pour raison de service, les marsouins du 3e escadron n'ont pu participer à cette ultime activité de cohésion.